Ces parfums et rumeurs qui me parlent d’Italie. Pour s’évader un instant
Campiglia, juillet 2019
Nous sommes arrivés un peu en avance à Campiglia, sur les hauteurs de La Spezia.
Les copains ne seront là que dans une vingtaine de minutes.
De la place du village, la vue sur la Méditerranée est à couper le souffle.
Devant la petite église Santa Caterina, des enfants jouent dans cette fin d’après-midi d’été. Leurs rires résonnent, cristallins. Soudain, il est huit heures et les cloches de l’église commencent à retentir.
Le temps suspend son vol. Je suis happée par le son délicat, qui ne durera que quelques secondes.
C’est l’instant de grâce.
Un moment purement italien.
Comme je les aime.
Certaines odeurs, certains bruits sont, pour moi, indissociables de l’Italie.
Comme les carillons des églises de quartier.
J’ai une mémoire olfactive très évocatrice. Un peu comme Proust avec sa madeleine, un parfum réussit à me faire voyager par le souvenir pendant quelques secondes.
En fermant les yeux, je suis immédiatement transportée. Loin… Très loin. L’état de pur bonheur auquel ce souvenir est lié laisse mon cœur léger.
Aujourd’hui, j’ai eu envie de vous emmener avec moi à travers quelques voyages olfactifs et auditifs.
Vous venez ?
« Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine. »
À la recherche du temps perdu, Marcel Proust
Le caffè : un incontournable
Le café est une odeur fortement liée à l’Italie pour moi.
Quand j’habitais Florence, je partais travailler à pied.
Le matin quand je sortais de chez moi, déjà sur les trottoirs des bars, l’odeur de café se répandait et venait me titiller sur le chemin du travail, avec une seule hâte : pousser la porte de l’hôtel et demander à ma collègue, en service dans la salle du petit-déjeuner, de me préparer, le tant attendu cappuccio.
Je me souviens que la première fois que cette odeur m’a marqué, c’était à Rome.
Au lycée, avec deux professeures d’italien et une vingtaine d’élèves, on était parti en voyage scolaire.
En descendant du train à Termini, j’étais affamée et l’odeur de café m’avait chatouillée les narines.
Il n’était même pas sept heures.
Un peu plus tôt, on avait vu le jour se lever sur la campagne qui défilait, avant de rentrer dans Rome.
Plus tard, j’ai appris à boire mon caffè au comptoir, en observant le ballet du barista et savourant le nectar corsé, à peine sucré.
Il n’est jamais bouillant, juste chaud, pour s’en délecter de la première à la dernière gorgée.
Pendant ces brèves minutes, j’adore écouter la rumeur des conversations autour de moi, l’échange de nouvelles entre le barista et ses habitués, les commentaires au sujet de la politique ou plus souvent du match de la vieille.
Mais, c’est quand même le capuccino que je préfère accompagné d’un cornetto bien bombé et fourré au chocolat.
Dans ces moments-là, j’aime m’asseoir en terrasse, si possible dans un caffè historique comme Paszkowski, piazza Repubblica à Florence, la chaise tournée vers la place.
Et j’adore surtout regarder le va-et-vient des gens devant moi : les hommes d’affaires en costume, les étudiant.e.s, les signore élégantes, tous lunettes sur le nez.
Et autour de moi, l’air frais du matin fleure bon le café fraîchement moulu et les camerieri, aux corps longilignes, moulé dans un pantalon noir et une chemise blanche, entament leur danse de tables en tables, parfois avec le sourire, parfois sans.
Comme il est bon de se laisser envahir par cette atmosphère en savourant ma crème de lait.
La focaccia : un goût de Ligurie
En Ligurie, l’odeur d’huile d’olive est légion le matin.
Elle côtoie délicieusement celle du café.
C’est peut-être pour ça que les Ligures ont pour habitude de manger la focaccia au petit-déjeuner en la trempant dans leur cappuccino.
Il faudrait que je demande à Christian ce qu’il en pense.
Moi, j’ai tenté une seule fois… Mais je ne sais toujours pas si je renouvellerai l’expérience.
Dans les rues de La Spezia, par exemple, on passe difficilement à côté.
L’odeur de focaccia se répand par les portes des forni, dès le matin.
Elle surprend.
Très agréablement.
Titillant gentiment le nez et réveillant l’estomac.
La visite au marché, qui se tient tous les matins Piazza Cavour, ne fera qu’attiser cette sensation.
Surtout en déambulant entre les camions de charcuteries, viandes et fromages.
Pour la faire taire, il ne vous reste plus qu’à entrer dans un forno et commander votre tocco.
La Vespa : tout un symbole
Parfois agréable, parfois irritante, la rumeur que j’associe indéniablement à l’Italie, c’est la Vespa.
Partie intégrante du paysage urbain, la Vespa est le symbole des années 1960, du boom économique, de la Dolce Vita.
Je suis toujours en train de les photographier.
Je me souviens, lors de mes premiers voyages en Italie, de ces parkings dédiés au célèbre deux-roues, qui n’en finissaient plus.
Là, encore, combien de clichés, j’ai fait!
La chanson de Lunapop, Vespa 50 Special, résume à elle seule, l’esprit du petit bolide :
« Dammi una Vespa e ti porto in vacanza… »
Le Vermentino : indissociable de l’aperitivo
Le Vermentino, ce cépage blanc, est un indissociable de l’aperitivo.
De couleur jaune paille, avec des arômes intenses de fleurs sauvages et d’herbes, c’est un vin d’une délicate douceur.
Surtout quand on est à La Spezia, où la majorité des vins blancs sont issus de ce cépage, j’adore le boire pour l’aperitivo.
En Ligurie, ce cépage est très développé sur la Riviera du Levant et la province de La Spezia représente la plus grande production de la région.
Il est associé pour moi, à ce petit bar au-dessus de Riomaggiore, où avec quelques fèves, des olives taggiasche on admire un coucher de soleil sur les Cinq Terres.
Un plaisir simple, mais tellement italien.
Le gelato : un goût tellement régressif
J’adore les glaces artisanales. Même si je choisis toujours le même parfum : cioccolata & panna.
Je ne mange presque jamais de glace industrielle. Sauf une ! Que je vénère sans réserve : le Stecco Ducale de la Sammontana.
Il reste pour moi associé aux souvenirs de vacances en l’Italie, à l’été, en famille.
Quand revient l’été, avec Christian, on redevient deux gamins, quand on entre dans un bar et qu’on aperçoit dans les frigos l’emballage bleu caractéristique.
On se délecte de l’énorme bâtonnet enrobé de chocolat noir au cœur de fiordilatte.
La musique : ma compagne quotidienne
En ce moment, c’est la musique qui m’accompagne pour voyager en Italie.
Si la musique adoucit les mœurs, elle adoucit aussi la quarantaine.
Elle m’a accompagnée dans ces journées un peu particulières, me mettant même un peu de baume au cœur en repensant à nos départs en vacances, l’été, en Toscane, dans la famille de mon père.
Quand pendant que les kilomètres d’autoroute défilaient, la radio diffusait les standards italiens :
Azzurro… Sarà perché ti amo… Felicità… Il Mondo… Tu vuoi fare l’Americano… I Maschi… Se bastasse una canzone… Più bella cosa… L’Italiano… Volare
Les vacances pouvaient commençaient à ce moment-là et ces chansons nous accompagnaient pendant tout le voyage du sud de la France, jusqu’en Toscane.
La porchetta : l’allié des vacances
Jusqu’en 2015 je n’avais jamais mangé qu’en Toscane.
Un samedi après-midi, grâce à deux toscans d’Arezzo, immigrés en Angleterre, je l’ai aussi mangé sur le marché de Notting Hill à Londres.
Et quelle porchetta !
La porchetta fait aussi office de madeleine de Proust pour moi.
Quand un peu réchauffée, elle libère les arômes d’herbes, c’est toute mon enfance qui remonte à la surface.
Quand on était en vacances à Castiglion Fiorentino durant l’été 1995.
On en achetait des kilos au camion sur les marchés ou sur les bords des routes.
La dernière que j’ai mangé, c’était à notre arrivée sur l’Amiata, en décembre.
L’énorme panino semblait vouloir me souhaiter la bienvenue !
Parfois il suffit juste de fermer les yeux pour commencer à voyager.
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